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Les conditions d’application du bail dérogatoire

Bail commercial

Le bail dérogatoire est spécial et demande de la rigueur.

En immobilier d’entreprises, les parties qui remplissent les conditions relatives au statut des baux commerciaux peuvent décider de déroger volontairement au statut et conclure un bail dérogatoire. Il s’agit d’un « bail à l’essai » ou d’un « bail courte durée » devant déboucher sur un bail commercial (cf. article – Le bail dérogatoire ne doit pas être sous-estimé).

Mais quelles sont les conditions permettant aux parties de conclure un bail dérogatoire ?

L’article L 145-5, al. 1 du Code de commerce relatif au statut des baux commerciaux encadre la conclusion d’un bail dérogatoire et précise que :

  1. La durée totale du bail dérogatoire ou des baux successifs n’excède pas trois ans ;
  2. Le locataire et le bailleur aient voulu conclure un bail dérogatoire au statut des baux commerciaux.

Attention : afin de pouvoir déroger au statut des baux commerciaux, il est nécessaire d’y être soumis et de remplir les conditions d’application statutaires (cf. article – Zoom sur le statut des baux commerciaux). Ainsi, le bail de courte durée ne déroge au statut que par sa durée ; l’occupant qui n’exerce pas d’activités commerciales ou assimilées dans le local ne peut donc pas prétendre être titulaire d’un bail soumis au statut des baux commerciaux (CA Aix-en-Provence 28-11-2019 n° 19/04808 : RJDA 8-9/20 n° 413).

  1. Bail de courte durée (trois ans maximum) :

Les parties peuvent, lors de l’entrée dans les lieux du locataire, déroger aux dispositions du statut à condition que la durée totale du bail ou des baux successifs n’excède pas trois ans (C. com. art. L 145-5, al. 1).

Le point de départ du bail est « l’entrée du locataire dans les lieux », laquelle désigne la prise de possession des locaux en exécution du bail conclu avec le propriétaire.

Attention : est exclu du calcul de la durée du bail, le temps de présence du locataire dans les lieux avant le point de départ du bail. Ainsi, ne sont pas incluses dans la durée du bail :

La durée du bail se calcule au jour près. Ainsi, un bail de 36 mois qui commence à courir le 1er juillet 2020 prend fin le 30 juin 2023.

Le locataire doit porter une attention particulière à la clause relative à la fin du bail : aucune prolongation tacite ne doit être prévue, faute de quoi le bail pourra se transformer en bail statutaire (cf. article – Le bail dérogatoire ne doit pas être sous-estimé).

  • Volonté des parties de conclure un bail de courte durée :

La volonté de conclure un bail dérogeant aux dispositions du statut ne se présume pas : elle doit être claire et non équivoque.

Elle peut être seulement tacite et résulter des circonstances de fait mais en pratique les tribunaux reconnaissent rarement l’existence d’un consentement tacite.

En effet, il a été jugé que le seul fait de fixer pour le bail une durée inférieure à la durée légale maximale (de trois ans) ne suffit pas à caractériser un bail dérogatoire (Cass. 3e civ. 2-2-2005 n° 135 F-PB : RJDA 5/05 n° 511).

Il est dont vivement recommandé aux parties, afin d’éviter toute difficulté d’interprétation de leur volonté, d’insérer dans le bail une stipulation expresse dans laquelle les parties prennent le soin d’écarter l’application du statut des baux commerciaux, sans qu’il soit nécessaire de motiver leur choix en faveur du bail dérogatoire.

Au total, le bail dérogatoire est un contrat bien plus complexe qu’il ne paraît et qui appelle à la plus grande des vigilances des parties lors de sa rédaction. L’article L 145-5, al. 1 du Code de commerce fixe les conditions à respectes par les parties leur permettant de déroger au statut des baux commerciaux.

Recommandation : consultez votre avocat ou votre notaire qui vous assistera dans la rédaction et la gestion de votre bail commercial.

Publié le 5 mai 2023 par Pierre FUCHS