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L’étendue de la clause de destination du local

Bail commercial

Quels sont les outils permettant aux parties d’encadrer et modifier l’activité du locataire dans le local ?

Dans le cadre d’un bail commercial, l’article 1728 du Code Civil stipule que le locataire est tenu « d’user de la chose louée raisonnablement et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d’après les circonstances à défaut de convention » (cf. Article – Bailleur et locataire sont étroitement liés par la destination du local).

En immobilier d’entreprises, les parties déterminent par voie contractuelle la destination du bail. Le locataire n’est pas autorisé à exercer une activité autre que celle prévue dans le bail. Les parties aménagent donc cette clause en fonction de l’activité du locataire et au regard des possibilités d’aménagement du local. L’affectation contractuelle des lieux peut être :

  • Très restrictive, autorisant l’exercice d’une seule activité et obligeant ainsi le locataire à s’y conformer. À défaut, le bailleur peut demander actionner la clause résolutoire ou demander la résiliation judiciaire du bail commercial ;
  • Au contraire, large, permettant l’utilisation des lieux pour plusieurs types d’activités ;
  • Les parties peuvent aussi prévoir une clause dite « tous commerces » permettant au locataire d’exercer dans les lieux l’activité de son choix.

Toutefois, certaines activités, bien que non expressément citées, peuvent être considérées comme étant implicitement incluses dans la destination contractuelle. En pratique, les juges du fond disposent à cet égard d’un pouvoir souverain d’appréciation pour interpréter la clause de destination du bail.

Ainsi, afin de lever toute incertitude et le risque de requalification de la destination du bail, il est recommandé aux parties d’être les plus descriptives possibles dans la rédaction de cette clause.

Il est par exemple d’usage dans le cas d’une clause très restrictive de se référer à l’objet social de l’activité du locataire (ex : commerce de boissons, quincaillerie, travaux du bâtiment, blanchisserie, etc. ). A contrario, il est recommandé en présence d’une clause à destination multiple des lieux, d’énumérer les différentes activités de façon limitative et précise, puis de prévoir si le locataire peut exercer les activités mentionnées de façon cumulative ou séparément.

Attention : le locataire doit nécessairement obtenir l’accord préalable et exprès de son bailleur s’il souhaite exploiter le local pour une destination autre que celle prévue au bail. Une attitude passive du bailleur n’atteste pas de son accord au changement de destination du local par le locataire. Les parties peuvent également décider d’un commun accord de modifier conventionnellement la destination des lieux.

Le locataire doit être vigilant car il est parfois amené à modifier naturellement son activité sans penser à obtenir au préalable l’accord exprès du bailleur pour cette modification. Le risque de conflit peut découler d’un simple oubli portant sur un élément majeur du bail. En cas de manquement, le locataire s’expose à plusieurs sanctions infligées par son bailleur.

Toute modification de l’activité du locataire nécessite l’accord du bailleur mais en cas de refus de celui-ci, le locataire pourra recourir à la procédure de déspécialisation prévue aux articles L 145-47 et suivants du Code de Commerce. Il pourra ainsi :

  • Adjoindre à son activité principale des activités connexes ou complémentaires (déspécialisation partielle) ;
  • Changer totalement d’activité (déspécialisation plénière).

Au total, les parties doivent porter une attention particulière lors de la rédaction de la clause de destination du bail. Elles doivent définir avec précision les activités que le locataire est autorisé à exercer dans le local. Si le locataire souhaite toutefois exploiter le local pour une destination autre que celle prévue au bail, il doit nécessairement en faire la demande au bailleur pour obtenir son accord préalable. Si le bailleur lui oppose un refus, le locataire aura toujours la possibilité d’engager une procédure de déspécialisation partielle ou plénière.

Recommandation : consultez votre avocat ou votre notaire qui vous assistera dans la rédaction et la gestion de votre bail commercial.

Publié le 15 avril 2022 par Pierre Fuchs